La céramique Art nouveau en Normandie !
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- Pour touristes
Le début du XXe siècle marque la fin des poteries utilitaires en grès qui, pendant des siècles, ont permis à l’économie laitière normande et la vie domestique de se développer. En quelques années, la quasi-totalité des ateliers de poterie disparaît. Les quelques ateliers normands qui subsistent s’orientent alors vers une production de poteries « fantaisies » à destination des estivants de plus en plus présents, à cette époque, en Normandie. La bouteille ansée, appelée communément cruchon à calvados, décoré de branches et de fruits de pommiers en applique et diffusé par les distillateurs ainsi que la soupière individuelle transformée en bonbonnière pour les confiseurs constituent alors la nouvelle image de la Normandie potière durant tout le XXe siècle.
Cependant, rompant radicalement avec la tradition des grès utilitaires, un céramiste expert dans l’utilisation des émaux, Louis Étienne Desmant, se distingue dans l’ouest de la Normandie, dès la fin du XIXe siècle [1], en réalisant une production de céramiques lustrées d’inspiration « hispano-mauresque ». Il invente aussi les décors reprenant des scènes de la Tapisserie de Bayeux qui sont à l’origine d’un succès commercial remarquable qui durera jusqu’aux années 1960.
UN CHERCHEUR-CÉRAMISTE
Né à Choisy-le-Roi (Seine) en 1844, Louis Étienne Desmant commence sa carrière comme ouvrier d’art à la manufacture de Sèvres. Il épouse, à Charenton-le-Pont le 20 juillet 1872, Gabrielle Walcher fille de Joseph Walcher, dessinateur dans cette manufacture (fig. 1).
Il aurait été par la suite « directeur de la manufacture de faïence et de vitraux »de Choisy-le-Roi mentionne Eugène Anquetil, vice-président de la Société des sciences, arts et belles lettres dans sa nécrologie en 1902.
Puis, il décide à 47 ans de s’installer à son compte à Boulogne-sur-Seine au 24 bis rue de Billancourt. Une réclame mentionne « Porcelaines et faïences artistiques à reflets métalliques… École persanne et hispano-mauresque » [2] (fig. 2). Cet atelier fonctionne de 1891 à 1893. Lors de cette période, Louis Étienne réalise également des vases en pâte de verre moulé et décoré au pinceau. Il part ensuite en Belgique étudier les grès de Flandres et les faïences de Tournai.
LA TERRE DE NORON
Quelques temps après, il arrive en Normandie, au sud-ouest de Bayeux dans le centre potier de Noron / Le Tronquay pour y étudier « la terre à potier, ses lavages, ses broyages, sa facilité à se laisser modeler et sa résistance aux hautes températures » [3].
Plusieurs auteurs mentionnent sa présence, pendant quelques mois, dans l’atelier de Désiré Ygouf (1842-1904) au Tronquay, commune potière jouxtant Noron-la-Poterie (Calvados), mais ils n’indiquent pas leurs sources. Si cette collaboration n’est pas avérée, plusieurs éléments permettent d’imaginer que Louis Étienne Desmant a très probablement rencontré et échangé, sinon travaillé, avec le maître potier Ygouf.
Dans ce centre potier de Noron / Le Tronquay « où toute innovation semble absente »à la fin du XIXe siècle, rappelle René de Brébisson [4], un maître potier semble en effet se démarquer : Désiré Ygouf. Il vient de faire construire, en 1887, une nouvelle poterie qui dispose même d’un malaxeur à manège. « Cette fabrique allait devenir la plus importante du Tronquay, au début du XXe siècle. » [5]
Par ailleurs, la fabrique Ygouf aurait inventé les poteries « touristiques » décorées de branches et de fruits de pommiers en applique,à destination des estivants :« Désiré Ygouf était marié avec Anaïs, une fille de Jean Langlois. Elle lança, au dire de René Castel la poterie de « fantaisie ».[6]
Autre indice, les propriétaires actuels de l’atelier dans lequel emménage Desmant à Subles en 1895 possèdent plusieurs poteries signés Ygouf trouvées sur place, dont plusieurs petits vases non cuits signés YTD qui pourrait signifier selon certains collectionneurs « Ygouf Tronquay Desmant », ou Désiré !
Est-ce la notoriété de la terre grésante de Noron sur laquelle il voulait expérimenter des émaux, ou celle des maîtres potiers de ce centre qui fit arriver Louis Desmant en Normandie ? Est-ce un potier normand à la recherche d’innovation qui lui proposa de venir afin de bénéficier de ses compétences techniques sur l’émaillage ?
Lors de cette période, René de Brébisson mentionne une production de grès flammés dans l’atelier de Désiré Ygouf et l’encourage dans ce sens : … « Il n’y aurait donc pas de progrès à signaler, si je n’avais à parler des tentatives de M. Désiré Ygouf. Depuis quelques années, il a adjoint à sa fabrication courante de poteries de grès, des essais de céramiques artistiques. Ses grès flammés à reflets métalliques sont forts intéressants [7]. Quelques-unes des pièces exécutées par lui peuvent rivaliser avec celles de Vallauris [8] ; d’autres rappellent les faïences persanes. Il faut espérer que M. Ygouf ne s’arrêtera pas en si beau chemin. » [9]
Cependant, l’atelier du maître potier Ygouf n’est aujourd’hui connu que par sa production utilitaire émaillée au sel et par la poterie de fantaisie à décors en applique utilisée, en cette fin du XIXe siècle, comme cadeau publicitaire [10], avant de devenir la principale production touristique du XXe siècle (fig. 3). A-t-il bénéficié, pendant cette courte période, des conseils de Desmant dans le domaine de la chimie de l’émaillage pour expérimenter une production des grès flammés ?
Vers 1895, Louis Desmant crée son propre atelier de céramique dans le bourg de Subles (Calvados) au n° 38 de ce qui deviendra plus tard la rue Desmant. « Quand il fut sûr d’avoir sous la main une substance utilisable pour son travail artistique, il installa son établissement à Subles. » rappelle Eugène Anquetil. La localisation de cette commune, entre Bayeux et Noron-la-Poterie, lui permet de continuer à utiliser l’argile locale. De plus, elle se situe dans une région qui accueille à l’époque de plus en plus d’estivants, potentiels futurs acheteurs de céramiques artistiques.
LES DESMANT À SUBLES
Les conseils de Brébisson se terminaient ainsi : Je n’ai nullement l’intention d’engager M. Ygouf à abandonner la production commune pour se livrer exclusivement à la céramique artistique. Il ne faut pas se dissimuler que la poterie, étant de première nécessité, sera toujours d’une vente plus certaine et produira des bénéfices plus réguliers que les grès flammés à reflets métalliques. ».
Louis Desmant ne suivit pas ces conseils donnés au maître potier.
Avec cette terre de Noron qu’il maîtrise désormais, il participe au développement des différents courants artistiques de l’époque : pots émaillés à coulure dans l’esprit de Jean Carriès (1855-1894), à l’origine de « l’École de Carriès » en Puisaye, céramiques d’Auguste Delaherche (1857-1940) en Beauvaisis, céramiques d’inspiration « Art nouveau » à formes souples et décors irisés à festons et lambrequins présentant des motifs de fleurs, de feuillages et d’animaux.
Il apparaît aussi, à la toute fin du XIXe siècle, que Louis Étienne invente les décors « à la Tapisserie de Bayeux » [11], broderie du XIe siècle représentant la conquête normande de l’Angleterre que les visiteurs peuvent découvrir à Bayeux à 10 km de Subles. Cette invention devient rapidement un grand succès commercial. Peu après l’installation, son fils Lucien Adolphe, né en 1875, le rejoint travailler dans l’atelier.
Quelques mois avant 1897, René de Brébisson visite l’atelier devenu la « Poterie d’Art du Pays de Bayeux ». Il en fait une description détaillée : « Depuis quelques années, une fabrique de faïences et de grès artistiques est installée à Subles. Le directeur, M. Desmant, travaille seul avec son fils. La terre employée est extraite à Noron. Pour la confection des pièces rondes, on se sert de tournage ; pour les autres, du moulage (fig. 4, 5). (…)
Pour émailler, M. Desmant met, suivant les pièces, une couverte transparente ou un émail stannifère. Le four et les moufles sont chauffés au charbon de terre ou au coke (fig. 6).
La peinture est faite au grand feu, c’est-à-dire sur émail cru ou sous couverte. Les décors sont très variés (fig. 7) ; cependant, depuis plusieurs années, on cherche à Subles à imiter les faïences à reflets métalliques dans le genre des poteries persanes et hispano-arabes. On produit ainsi, avec des décors assez simples mais éclatants, de forts jolis effets, qui ont l’avantage d’être très décoratifs.
M. Desmant trouvant que la production artistique suffisait à l’occuper, ne fait aucune poterie commune. (…) Il y a donc tout lieu d’espérer que, dans quelques années, grâce aux efforts de MM. A. Le Duc, Ygouf et Desmant, la céramique artistique prendra, dans la région de Bayeux, un développement important et intéressant. » [12]
La production des deux céramistes est extrêmement variée (vases, coupes, cache-pots, jardinières, pots à tabac, pichets, chopes, plateaux, plaques, etc.) ainsi que les dimensions : du saleron de 5 cm au vaste cache-pot de plus de 80 cm de hauteur.
Alors que la signature gravée de Louis Étienne présente une écriture très ronde (fig.8), celle des pots réalisés conjointement par le père et le fils évolue : « le paraphe du père composant la première partie de la signature sur le fond ou au revers des poteries et celui du fils la seconde partie. » [13]
Cependant, s’inspirant mutuellement, le père et le fils continuent à réaliser dans leur atelier de Subles leur production à décors lustrés « Art nouveau », engagée à Boulogne-sur-Seine. Des œuvres à décor animalier provenant des deux sites sont particulièrement significatives.
Deux grands plats de plus de 40 cm de diamètre font partie des collections du Musée d’Orsay : l’un signé par Louis Étienne et daté de 1894, présente un coq attaquant toutes plumes dehors, émail lustré beige, vert et bleu [14] (fig. 9) ; l’autre de Lucien Adolphe représentant un combat de coqs émaillé rouge et beige produit entre 1900 et 1905 à Subles (fig. 10). Un troisième plat, dans les collections du Musée d’art et d’histoire de Bayeux produit vers 1900 par Lucien Adolphe représente un couple de faisans sur un fond rouge (fig. 11).
Père et fils travaillent ensemble jusqu’à la mort du père en 1902. Lors de la messe d’inhumation de Louis Étienne, le 18 août, dans l’église de Subles, Eugène Anquetil, vice-président de la Société des Sciences, Arts et Belles Lettres de Bayeux, rappelle les multiples facettes du disparu : « cerveau puissant, musicien non sans mérite, dessinateur et peintre justement apprécié, chimiste habile, émailleur céramiste de grand talent (…). M. Desmant fut ainsi le créateur d’une Poterie Normande, vraiment artistique,… »
Lucien Adolphe poursuit l’œuvre de son père.
Un dépôt-vente des céramiques est ouvert au 39, rue Saint-Martin à Bayeux tenu par M. Gastin, horloger [15] (fig. 12). Les productions sont également diffusées par la boutique Masson à Paris. Le succès des céramiques au décor « à la Tapisserie de Bayeux » est considérable. Les touristes « qui visitent Bayeux l’été aiment à [les] remporter comme souvenir de voyage » [16].
Lucien Adolphe Desmant signe la majorité de ses céramiques « Desmant Subles » ou Desmant Subles Normandie » en gravant le fond du pot d’une écriture vigoureuse avec des jambages prononcés pour les « m » et les « n » (fig. 13).
Pour ces céramiques à décors historiques, Jean-Claude Delauney parle d’inspiration « du style 1900, mais plus souvent évocatrice d’un art normano-scandinave du XIe siècle, reconstitué en termes contemporains ».
Au décès de Lucien Adolphe, l’atelier de Subles s’arrête définitivement.
LES DESMANT DANS LES COLLECTIONS PUBLIQUES
Au Musée d’art et d’histoire de Bayeux
La collection de référence des Desmant père et fils est conservée au Musée d’art et d’histoire Baron Gérard de Bayeux (Calvados). Elle s’est principalement constituée grâce à un important achat de la Ville de Bayeux en 1967 et de deux dons significatifs en 1928 (de Lucien Adolphe Desmant) et en 1981.
Les 70 pièces se divisent en 17 pour le père (dont 10 « Art Nouveau » et 7 « à la Tapisserie de Bayeux ») et 53 pour le fils (dont 5 « Art Nouveau » et 48 « à la Tapisserie de Bayeux »).
Il apparaît que le père utilisait souvent des émaux aux teintes douces dans les verts, beiges et bleus (fig. 14, 15 et 16) alors que le fils affectionnait les fonds rose/rouge (fig. 17).
Les formes des céramiques « à la Tapisserie de Bayeux » sont d’inspiration « Art Nouveau normano-scandinave », selon les termes de Jean-Claude Delauney (formes trapues, volutes massives, gros boutons hémisphériques, faux rivets, etc.) mais évoquent aussi des formes traditionnelles de Noron/Le Tronquay (bouteilles ansées, pichets, tabatières, porte-dîners, bonbonnières).
Une céramique est particulièrement remarquable. Traditionnellement au cours du XIXe siècle, les ateliers de Noron / Le Tronquay ont produit des « pichets d’amitié » dédicacés, destinés à être offert dans les grandes occasions. Fabriqués au tour avec une panse ovoïde et un col étroit, ils étaient ornés d’un décor en applique de terre jaune représentant des feuilles de chêne ou de laurier (fig. 18). Lucien Adolphe réalise dans le premier quart du XXe siècle, un pichet possédant une forme identique avec un décor émaillé de feuilles de chêne jaunes. Un serpent vert dont la queue constitue l’anse, enserre la panse et mange la Pomme (fig. 19). Syncrétisme remarquable entre tradition, techniques nouvelles et création artistique !
Ce musée conserve également deux vases en verre soufflé et moulé à motif irisé, vraisemblablement réalisés vers 1890-1895 (fig. 20). Il semble que Louis Étienne Desmant peignait ses décors avec un émail liquide sur des pièces en blanc provenant de manufactures, puis cuisait les pièces dans son four de céramiste entre 400 et 600° C [17].
Musée d’art et d’histoire Baron Gérard à Bayeux (Calvados)
https://www.bayeuxmuseum.com/musee-dart-et-dhistoire-baron-gerard/
Au Musée de la poterie normande
Très récemment, une autre collection publique a bénéficié d’un don exceptionnel de 81 céramiques des Desmant père et fils. Il s’agit du Musée de la poterie normande, implanté sur l’ancien site potier du Placître à Ger (Manche), qui a reçu ce don de MM. Dame-Dieu et Pedoussant.
Ellel est constituée de 2 céramiques « Art Nouveau » (l’une à coulures, du père (fig. 21) ; l’autres à papillons et volutes (n° d’inventaire Ge.2019.2.1.) qui pourrait être une production conjointe au vu de la signature selon l'analyse de Jean-Claude Delauney) et de 79 céramiques « à la Tapisserie de Bayeux » (dont 76 du fils et 3 qui pourraient avoir été produites conjointement).
Lors de l’étude de ces céramiques afin de les documenter, il a été porté une attention particulière aux décors « à la Tapisserie de Bayeux » [18]. Cette analyse n’est bien entendu pas exhaustive, mais reflète cependant plusieurs traits du travail des Desmant.
32 de ces décors (40 %) concernent la scène 23 de la Tapisserie de Bayeux : Guillaume sur son trône avec une épée et le doigt tendu, accompagné de deux gardes reçoit le serment d'Harold sur des reliques. « Cette scène est capitale dans l’économie de l’œuvre » [19].La scène sur les céramiques n’est jamais complète et se limite souvent à un des deux personnages recadré (fig. 22).
L’intérêt que porte Lucien Adolphe à cette scène, à l’origine de la conquête de l’Angleterre, se confirme par la plaque publicitaire déjà présentée de la boutique de Bayeux qui présente exceptionnellement la totalité de la scène 23. Il faut probablement prendre en compte également, pour les petites pièces, la rapidité d’exécution qu’amène un travail répétitif.
Au-delà de cette préférence, il n’y a pas de volonté historique ni chronologique dans le choix des scènes de la part du décorateur. Une céramique à plusieurs décors présente des scènes historiques sans rapport entre elles. Le choix esthétique semble primer. Les scènes reproduites sont essentiellement extraites de la narration principale de la broderie.
En dehors des animaux fantastiques, décors très utilisés pour les petits objets (oiseaux à ailes multicolores, lions à tête d’oiseaux librement inspirés de la broderie et un chameau de la scène 13 (n° d’inventaire Ge.2019.2.4 et 75), seuls, quelques pots de grande hauteur présentent parfois les frises supérieures et inférieures en rapport avec le sujet principal (scène 1 et 53 de la Tapisserie. Scène 13 et 16 de la Tapisserie pour le n° d’inventaire Ge.2019.2.75). (fig. 23).
Aucune scène des fables et de la vie quotidienne n’est reproduite. Lucien Desmant privilégie les grands personnages de la Tapisserie qui doivent être plus vendeurs.
Sur le plan plastique, les pièces analysées signées Lucien Adolphe Desmant montrent que :
- Les couleurs d’origine de la broderie ne sont pas respectées, ce qui n’empêche pas les scènes, systématiquement sur fond beige, de présenter une ambiance « médiévale » pour les acheteurs.
- Les visages dessinés sont très anguleux avec souvent une expression dure, principalement pour Harold avec son nez pointu et sa moustache horizontale (fig. 24).
- Chaque décor est un extrait fidèle de la broderie, sans volonté de faire comprendre la scène. Ainsi un vase montre six anglais pointant du doigt vers la comète de Halley sans la représenter (Scène 32 de la Tapisserie. N° d’inventaire GE.2019.2.57) (fig. 25). Sur un autre vase, des soldats normands traversent une rivière, un morceau de tissu figuré en haut à droite du décor est en fait la base du rocher du Mont-Saint-Michel (Scène 16 de la Tapisserie. N° d’inventaire GE.2019.2.52). Sur un troisième vase, un chevalier normand à cheval, tout harnaché, reçoit les clefs de la ville de Dinan qui ne sont pas représentés (Scène 20 de la Tapisserie. N° d’inventaire GE.2019.2.53).
- Les textes en latin sont également tronqués et lorsque les personnages sont mis en évidence leurs noms est inséré dans le décor « WILLELM: », HAROLD: (N° d’inventaire GE.2019.2.50, 60, 61, 65).
Enfin, dans cette nouvelle collection publique, se retrouvent les formes « normano-scandinaves » identifiées dans la collection du Musée de Bayeux auxquelles s’ajoutent des blasons, des plateaux et des grands vases aux anses en forme de haches (N° d’inventaire Ge.2019.2.71, 72 et 73) ou en forme de cornes (N° d’inventaire Ge.2019.2.56 et 57).
Musée de la céramique - centre de création ex Musée de la poterie normande à Ger (Manche)
http://www.manche.fr/patrimoine/musee-regional-poterie-N.aspx
https://www.facebook.com/poteriedeGer/
Au Musée d’Orsay
Comme cela a déjà été cité, ce musée possède deux grands plats à décors de coqs, l’un réalisé par le père, l’autre par le fils.
Les collections de ce musée comportent également deux vases en verre lustré de cuivre et d’argent achetés à Louis en 1895 par le Musée du Luxembourg (Paris), une bouteille de Louis Étienne et une gourde à décor de houx de Lucien Adolphe.
Musée d’Orsay (Paris)
https://www.musee-orsay.fr/fr/collections/catalogue-des-oeuvres/resultat-collection.html?no_cache=1
LES SUIVEURS
Le succès commercial des céramiques « à la Tapisserie de Bayeux » amène un émule des Desmant, implanté à Caen, René-Émile Brenner (1889-1943), à poursuivre cette production « à la Tapisserie de Bayeux », en complétant souvent les décors d’un émaillage doré (fig. 26).
Il faut noter que Brenner accueille et forme dans son atelier, de 1929 à 1931, Pierre Pissareff (1904-1981), futur grand céramiste du Beauvaisis.
Dans le même esprit, Marcel Vautier dans son atelier "Céramique d'art de Mondeville" (Calvados) produit des céramiques à décor bayeusain jusqu'en 1940, ainsi que la Tuilerie normande du Mesnil-de-Bavent, Victor Lamy et son décorateur Jimm (fig.27) et la faïencerie de la baie à Saint-Pair-sur-mer (Manche).
Hors de Normandie, voyant le succès commercial des décors à la Tapisserie de Bayeux, plusieurs manufactures se sont également mis à produire de tels décors : Géo Martel à Desvres, La Grande Maison HB à Quimper, Saint Clément à Lunéville, etc.
Mais la plupart de ces suiveurs ne retrouvèrent jamais la qualité graphique, les formes inventives et la richesse des émaux lustrés de Desmant père et fils.
PARMI LES PLUS GRANDS
Alors qu’à la fin du XIXe siècle, dans les grandes régions potières françaises, des céramistes devenaient des références incontournables, comme Clément Massier (1845-1917) à Vallauris, Auguste Delaherche (1857-1940) dans le Beauvaisis ou encore Jean Carriès (1855-1894) en Puisaye, les Desmant, en Normandie, n’ont pas bénéficié de cette notoriété.
Pourtant, par leurs recherches sur les émaux lustrés à reflets métalliques, l’originalité de leurs créations, l’invention des décors et des formes « à la Tapisserie de Bayeux » et leurs qualités de dessinateurs, Desmant père et fils se positionnent parmi les grands céramistes de leur époque.
François Toumit / AAPG
Un grand merci à Dominique Hérouard, directrice du Musée d’art et d’histoire Baron Gérard de Bayeux qui a fourni la documentation en sa possession sur les Desmant et a autorisé les reproductions des céramiques de la collection du musée.
La famille Desmant
Louis Étienne Desmant, né le 27 mai 1844 à Choisy-le-Roi (Seine), décédé le 15 août 1902 à Subles (Calvados). Inhumé à Boulogne-Billancourt.
Marié à Gabrielle Watcher (1846 - 1882), fille d’un dessinateur de la manufacture de Sèvres
Trois enfants :
- Maurice Noël Desmant, né le 11 juillet 1873 à Charenton-le-Pont, décédé le 22 mars 1876.
- Lucien Adolphe Desmant, né le 1ermars 1875 à Charenton-le-Pont (Seine), décédé à Subles (Calvados) le 20 octobre 1929. Marié le 7 mai 1903 à Berthe Grimault à la mairie de Boulogne-sur-Seine.
- Marie Suzanne Desmant, née le 18 octobre 1879 à Charenton-le-Pont. Mariée le 18 août 1903 à Louis Gervains à la mairie du huitième arrondissement de Paris.
Notes
[1] Un autre artiste de la Normandie de l’ouest mérite également d’être cité : Arthur Le Duc (1848-1918) dont l’œuvre céramique remarquable est moins connu que ses sculptures en bronze ou en pierre. Voir article sur le musée de Torigny https://ceramique-traditionnelle-en-normandie.fr/lieu/musee-arthur-le-d…
[2] 1893, Exposition d’art musulman, Palais de l’Industrie, Paris, Catalogue officiel, Paris, 1893, p. 242.
[3] Anquetil Eugène, Louis-Étienne Desmant, nécrologie, Société des Sciences, Arts & Belles Lettres de Bayeux, volume 7, 1902, p. 192.
[4] Brébisson (de) René, Histoire de la céramique à Bayeux et dans sa région depuis le XIIIe siècle jusqu’à nos jours, Société des Sciences, Arts & Belles Lettres de Bayeux n°2, volume 4, J-6-9, 1897, p. 83.
[5] Bernouis Philippe, Les centres potiers de la Manche et du Bessin aux XIXe et XXe siècles, rapport de synthèse et dossiers photographiques, minutes manuscrites inédites. Service régional de l’Inventaire général de Basse-Normandie et association Histoire et Patrimoine Industriels de Basse-Normandie, Caen, 1989. Déposés au Service de l’Inventaire général du patrimoine culturel de Normandie, 30 rue de la Masse, Caen.
[6] Lailler Dan, Le centre potier de Noron-la-Poterie, monographie 1810-18, tapuscrit, 1943-1944, p. 63. Dan Lailler mentionne également que René Castel était le gendre de la fille de Mme Désiré Ygouf. Il reprend la fabrique des fils Ygouf en 1925.
[7] Le Musée d’art et d’histoire de Bayeux conserve une petite coupe émaillée bleu-vert, fabriqué par l’atelier de Désiré Ygouf vers 1895, provenant de la collection de J.C. Delauney. Elle est également signée en creux YTD.
[8] À Vallauris, Clément Massier a créé sa propre fabrique de céramique en 1883 et développe quelques années plus tard une production à reflets irisés d’inspiration hispano-mauresque.
[9] Brébisson (de) René, op. cit., p. 83 et 84.
[10] Bernouis Philippe, La poterie d’Yves Cheval au Tronquay (Calvados) - Les centres potiers de la Manche et du Bessin aux XIXe et XXe siècles, rapport de synthèse et dossiers photographiques, minutes manuscrites inédites, op. cit.
[11] Plaque commémorative au décor « à la Tapisserie de Bayeux » datée de 1897 signée de Louis Étienne Desmant (n° d’inventaire C3244 - MAHB - Musée Baron Gérard).
[12] Brébisson (de) René, op. cit., p. 85 et 86.
[13] Delauney Jean-Claude, Renouveau des poteries de Noron, L’Almanach Lauritz n°5, juillet-août 1995, p. 5 à 7. J.C. Delauney était avocat à Caen, ancien bâtonnier, grand collectionneur de céramiques du Bessin.
[14] N° d’inventaire OAO 156 - Musée d’Orsay. Acheté en 1895 à l’artiste par le Musée du Luxembourg à Paris après sa présentation au Salon de la Société nationale des beaux-arts au palais du Champ-de-Mars en 1894.
[15] N° d’inventaire C 1554 - MAHB et Beauvallet Lucien, MM. Desmant, père et fils, céramistes à Subles, article de la Renaissance du Bessin, non daté.
[16]Anquetil Eugène, Louis-Étienne Desmant, nécrologie, op. cit., p. 192.
[17]L’objet du mois, Vase Louis Étienne Desmant - Don de l’association des donateurs et amis du MAHB - Inv C3275, octobre 2017, MAHB, et inv. C2282 - MAHB.
[18]Musset Lucien, La Tapisserie de Bayeux, œuvre d’art et document historique, Édition Zodiaque / Introduction à la nuit des temps, 1989.
[19]Bouet Pierre, Neveux François, La Tapisserie de Bayeux, révélations et mystères d’une broderie du Moyen Âge, Éditions Ouest-France, 2018, p. 100.
rue Desmant
14400 Subles
France
Commentaires
Superbe artcile
Superbe article sur ces céramistes !
Merci !
Ces Desmant étaient vraiment…
Ces Desmant étaient vraiment des céramistes novateurs ! On ne peut que s'attacher à eux lorsque l'on fait des recherches. FT
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