L’histoire de deux épis de faîtage
- Mortainais Domfrontais
- Dans l’architecture
Les régions potières sont souvent identifiables par la présence sur les toitures des maisons du secteur de nombreux épis de faîtage. Ces objets de poterie, plus ou moins élaborés, d’abord destinés à protéger les bois de charpente, sont rapidement devenus des éléments décoratifs, marqueurs de la richesse du propriétaire.
Leurs présences sont attestées dès XIe siècle sur la « Tapisserie de Bayeux ».
Dans le Mortainais / Domfrontais, il semble que l’implantation de ces épis se soit cantonnée aux manoirs, aux hôtels particuliers urbains et aux ateliers de production potière.
L’habitat local possédant principalement des toitures à deux pans avec des souches de cheminée sur les deux pignons ne justifie pas l’existence de ces épis de faîtage.
L’analyse des sources iconographiques locales - cartes postales du début du XXe siècle essentiellement - montre que si quelques toits de chaume subsistent, l’ardoise est le matériau principal des couvertures du bourg de Ger, avec quelques faîtages en tuiles mais le plus souvent c’est le zinc qui est utilisé pour ces faîtages, les arêtiers et les noues.
Au village du Placître, actuel Musée de poterie normande, la connaissance précise de deux épis a permis d’engager une reconstitution.
Napoléon !
Jusque dans les années 1970, un des maisons de maître-potier du Placître construite par « G.E.ESNEU H.B. F.quant. DE POTS ET SU.ne. SIMON SON EPOUZE …LAN 1823 » (dédicace du linteau) a porté sur le faîtage de sa lucarne un épi de faîtage représentant « Napoléon ».
En 1994, l’envoi de photos du « Napoléon » par l’ancienne propriétaire de la maison à Francine Aguiton, initiatrice du musée, permet de mieux connaître l’épi : il s’agit d’un personnage sculpté aux traits grossiers, les cheveux noués en catogan, coiffé d’un bicorne. Le rictus de la bouche laisse supposer la présence ancienne d’une pipe.
Une cinquantaine d’empreintes de rouelles - symbolisant le tour à bâton des potiers - est imprimée en creux sur le cou et le buste composés d’une succession de cinq disques qui ont été tournés. Enfin, deux anses peuvent rappeler les bras du personnage.
La qualité des photographies ne permet pas bien d’identifier la terre d’origine, mais des éléments grossiers particulièrement visibles dans le bicorne laissent supposer qu’elle a été fabriquée en « terre jaune » locale et non en terre grésante de la Goulande.
… et Joséphine
Un autre épi de faîtage originaire du Placître se trouve dans les collections du musée et est présenté dans l’exposition permanente. Appelé ironiquement par les anciens habitants du village « Joséphine », en référence à la première épouse de Napoléon Ier, il a été fabriqué en « terre jaune ». Un empilement de quatre pots tournés et soudés entre eux se termine par sept disques (six subsistent) dont le diamètre diminue successivement. Sur deux niveaux, trois anses (dont certaines sont cassées) sont collées en alternance.
Copies conformes
A l’occasion de la fête du centenaire de la dernière cuisson dans le four potier du Placître, l’association des amis de la poterie de Ger a offert au musée les reproductions de ces deux épis de faitage afin que les toitures retrouvent leurs ornements.
Après consultation auprès de plusieurs céramistes, une commande a été effectuée auprès de Tony Mauger dont l’atelier est implanté à Touques (Calvados) ceramistepotier.free.fr / Tél. : 06 09 03 04 60.
Les épis, aujourd’hui en place, ont été inaugurés, le dimanche 30 juin 2019.
F. Toumit / AAPG
Le Placître
50850 Ger
France
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