Martincamp : un centre potier majeur en Seine-Maritime
- Pays de Bray
- À la cuisine
- Servir à table, au champ
- Les usages domestiques
Martincamp n’est pas une commune, seulement un hameau, dépendant de la commune de Bully, dans le Pays de Bray. Pourtant, c’était le plus grand centre de production de poterie populaire de Seine-Maritime du XVIIe au XIXe siècle, et surtout le seul à avoir produit du grès.
La commune de Bully est située à l’extrémité occidentale de la boutonnière du pays de Bray, à moitié dans la dépression, c’est le fond de Bully et à moitié sur le plateau, c’est le hameau de Martincamp.
UNE GROSSE MANUFACTURE DE POTS PRES DE LA FORET D'EAWY
Là, en partie enclavée dans la forêt d’Eawy, une « manufacture de pot » s’est progressivement développée, sans doute depuis le XVIe siècle, et jusqu’à la fin du XIXe siècle. Il ne faut pas entendre le mot manufacture dans son sens actuel : au XVIIe et au XVIIIe siècle, une manufacture, c’est le regroupement en un même lieu (mais pas sous un même toit) d’artisans nombreux qui produisent une même marchandise. Le nom de ce lieu, en l’occurrence Martincamp, est la marque qui permet d’identifier l’origine, donc la qualité et les caractéristiques d’une production.
DES POTS ET DES PLATS "EXPORTES AU LOIN DANS LA REPUBLIQUE"
Les potiers de Martincamp ont produit des pots et des plats, les premiers en majorité très utilitaires, les seconds très largement décoratifs. C’est une marchandise destinée à l’exportation (hors du pays de Bray), contrairement aux petits ateliers dispersés qui subsistaient du Moyen Âge et qui n’avaient que des ventes très locales. Martincamp est à quelques kilomètres, à plat, du carrefour des Hayons où se croisent les routes de Paris à Dieppe et de Rouen à Abbeville (voir la carte ci-dessus). Dans ces quatre directions, des sommes de cheval, puis des charrettes partaient régulièrement, puisque c’était jusqu’à 500 000 pièces qui étaient annuellement fabriquées et écoulées pendant la période la plus faste.
UN PRIVILEGE DE SEPT ARPENTS DANS LA FORET D'EAWY
C’est la proximité de la forêt qui explique le choix de cet endroit pour l’installation de la manufacture de pots. Les cuissons, partie la plus chère du processus de fabrication, exigent des quantités considérables de combustible et les potiers de Martincamp ont obtenu sous Louis XIV le privilège d’une vente de bois annuelle qui ne peut servir qu’à leur usage. C’est un moyen de valoriser le bois de chauffage de l’extrémité orientale de la forêt d’Eawy, trop loin de Dieppe (sept lieues) pour y être envoyé. L’installation des potiers, ainsi que celle de leurs voisins et concurrents verriers est encouragée par le pouvoir politique, notamment par Henri IV qui a eu une stratégie volontaire de développement industriel, distribuant assez facilement les privilèges et les autorisations d’installations de petites industries.
UNE TERRE AUX PROPRIETES TOUT A FAIT REMARQUABLES
Un autre élément était indispensable au développement de la poterie à Martincamp. Il s’agit d’une terre aux qualités tout à fait exceptionnelles , présente en quantité sur le territoire d’une commune voisine, une terre datant du Crétacé inférieur qui a la faculté de pouvoir être grésée. Cela signifie que si on la cuit à une température suffisamment élevée, elle devient totalement imperméable. Le grès est une céramique très valorisée et sa production génère toujours des centres potiers très importants.
Dubois Hébert T.-M. (2010), Les potiers de Martincamp (XVIIe-XIXe siècle), thèse d’histoire et archéologie, Université de Rouen, 4 volumes, 1354 pages (dactyl.).
Thérèse-Marie Hébert / GEVAC de Normandie
rue du four
76270 Bully
France
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